Témoignage de confinement : coincée aux Philippines
Ecrit par Marie TERRYle 14 juillet 2020
Pour certains de nos compatriotes, les vacances d'été 2020, n'auront pas le même goût. Beaucoup de français vivant à l'étranger profitent de ces mois de grandes vacances pour retrouver leur pays, la France. Déjà, un grand nombre d'entre eux, n'ont pas pu rentrer en France en plein boom de l'épidémie. Ils pensaient pouvoir partir cet été mais avec la situation mondiale due au Covid 19, ils ne vont pas pouvoir rentrer, retrouver leur famille et amis.Témoignage de Julie, qui a pu rentrer in extremis des Philippines en France où elle vivait mais qui a vécu son confinement, là bas !
Expatriée aux Philippines
Il y a 3 ans, j’ai pris une décision énorme qui a marqué un immense tournant dans ma vie : j’ai tout plaqué pour une passion que je découvrais à peine, le surf. Et me voilà 3 ans plus tard en ayant construit une toute nouvelle vie aux Philippines, à Siargao plus exactement.
Cette île, la plus à l’Est de l’archipel philippin, rassemble tout ce dont j’ai toujours rêvé : un cadre de carte postale, du soleil, des cocotiers, et surtout une douceur de vivre délicieuse au milieu de cet écrin 100 % surf. Cette vie profondément parfumée à la liberté, je la passe à 12 000 kilomètres, loin de la France et de mes racines. Et surtout, cette île, je l’aime comme si je l’avais toujours connue, comme si c’était vraiment mon chez-moi.
Un jour, la vague de COVID-19 qui s’est déversée sur notre planète, et le confinement qu’elle a entraîné, m’a fait voir cette île tant chérie d’une nouvelle façon.
J’aimerais vous raconter ce que j’appelle “l’envers du décor”, et ce que le confinement a créé comme émotions chez moi.
Une nouvelle facette de l’île
Bordée par la Mer des Philippines, Siargao est bien connue pour son exposition et donc pour capter la houle du Pacifique. Ce qui signifie donc d’avoir de belles vagues durant une bonne partie de l’année.
Depuis l’annonce du confinement, les enceintes qui battaient leur plein durant les soirées endiablées, ont été rangées pour une durée indéterminée. Nous qui pensions retrouver rapidement nos soirées endiablées, nous nous méprenions grandement. Et pire, nous ne le savions même pas. On se disait naïvement : “Bon, on en a pour 3 semaines de tout ça.”
Que nenni. Et j’ai été surprise de voir que, du jour au lendemain, toute la vie nocturne s’était arrêtée. Plus aucune soirée ne se jouait, plus aucun bruit de fête n’était entendu.
Et ce, même durant la journée. Même si en toute franchise, j’ai aimé ce calme et cette ambiance vidée de tous touristes. Dans les débuts du moins, je trouvais ça paisible.
Une nouvelle vie sans surf
Étant sûre de ne pas trop en faire : je peux dire que la vie sans surf pour moi, c’est un peu comme la vie en apnée.
C’est résolument le point le plus difficile sur lequel j’ai dû apprendre à gérer durant ce confinement. Et cela a été d’autant plus difficile, car en temps normal, dès que je ressens un coup de mou, la moindre contrariété, je file à l’eau et je me “bute” au surf. Surfer pendant cette période inquiétante de confinement aurait idéal.
Pour compenser, je me suis plongée dans le travail. Je suis rédactrice pour le web, apprentie journaliste pour certains magazines et projets personnels, et aussi aspirante écrivaine dans des rêves que je projette. Comme si j’avais constamment besoin d’occuper mon cerveau, pour éviter de penser à cette période que je trouvais profondément anxiogène.
Et du coup, pour survivre au manque de surf, j’ai décidé d’explorer le surf, mais au sec. J’avais besoin d’inspiration et j’ai regardé la liste longue comme le bras, de contenus sur le surf que j’avais accumulé depuis des années déjà.
Mais surtout, j’ai lancé un projet qui me tient énormément à cœur et que j’avais en tête depuis des années déjà : ma propre newsletter indépendante sur le surf : Do It Your Swell.
J’ai trouvé ça constructif, d’essayer malgré cette période hautement anxiogène et inquiétante, de construire et d’attiser ma créativité. Quelques semaines plus tard, je découvrais l’épisode “Se révéler pendant une crise”, de Clotilde Dusoulier, que je vous recommande chaleureusement.
Garder les pieds sur Terre
Le confinement a eu des conséquences inédites et extraordinaires sur notre cerveau. Pour essayer de conserver une bonne santé mentale, et ce, malgré la réduction drastique d’activités sportives que je connaissais, je me suis rapproché de la vie locale pour garder les pieds sur Terre et mettre un minimum de distance avec les écrans.
Je me suis mise à observer avec davantage d’attention l’île et ses habitants. Et j’ai vu que de superbes initiatives avaient été mises en place pour venir en aide à ceux qui en avaient besoin. Ceux qui ont été touchés de plein fouet par la désertion des touristes. Comme les petits commerçants, et les pêcheurs d’ici.
Pour ceux-là, un groupement de personnes s’est créé, et a distribué de la nourriture cuisinée fraîchement et avec amour. L’élan de solidarité m’a émue et réchauffé le cœur et l’esprit. Moi, à qui ma famille me manquait cruellement, j’ai réussi à trouver du soutien en observant.
J’ai pu aussi m’intéresser aux marques locales, celles pour qui l’inspiration est puisée directement depuis l’île Siargao.
Un contexte obscur et compliqué
C’était la première fois que j’avais autant envie de rentrer en France. Le fait d’être coincée quelque part, même si j’étais dans un cadre aussi paradisiaque qu’il puisse être, m’a fait me rendre compte de certaines choses. Comme à quel point il est difficile d’être loin de ses racines, de ses proches, de sa famille et de ses amis, dans un contexte aussi compliqué et aussi hautement anxiogène. Ce parfum de “fin du monde” pousse naturellement à s’inquiéter. Même si on le sait tous que cela ne sert à rien, on s’imagine nos parents, et personnes considérées à risque de notre entourage, courir le moindre danger quand ils vont faire leurs courses. D’autant plus que les médias n’ont pas aidé à calmer nos angoisses.
Et pourtant, j’ai eu réaction très surprenante, je ne sais pas pourquoi, mais je me suis mise à suivre les actualités françaises de près. Et en tant que voyageuses, nous savons tous qu’avec l’aide d’un VPN, il est tout à fait possible de le faire. Je pense qu’inconsciemment, j’avais besoin d’imaginer ce que mes proches vivaient.
Le mot de la fin
Adopter la vie de nomade n’est pas fait que de rêves et de décors paradisiaques. Il y a aussi un exercice constant à prendre en compte tout le long de sa vie “au loin” : celui de devoir apprendre à vivre avec le manque perpétuel de quelque chose, de ses racines, des gens qu’on aime.
L’exercice n’a jamais été simple pour moi, et je pensais, avec ignorance et insouciance avoir fait le tour de la question, en me disant sans cesse : “s’il se passe quoique ce soit, tu prends un billet d’avion et tu rentres”.
Mais je n’ai jamais pensé que je serais un jour être confrontée à cette impossibilité de mouvement.
J’ai vu aussi, que dans le confinement, chacun apprend à gérer cette épreuve à sa propre manière. Certains se plongent dans le sport, d’autres préfèrent l’introspection. Même si les deux peuvent très bien aller ensemble.
Mais aussi, j’ai pu voir que ce moment plein de contrariétés pouvait être une occasion d’apprendre à prendre les choses à contre-pied. Une occasion extraordinaire de percevoir les leçons à assimiler.
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