Rencontre avec Juno, le groupe découvert par My Major Company
Ecrit par Sabrina Cicchinile 23 octobre 2012
Il est loin le temps où Yann et Julien étudiaient le droit à la fac de Nanterre. Depuis une dizaine d’années, ces deux amis sont liés par leur amour pour la musique, notamment celle des années 80. Après de nombreuses aventures musicales, dont la formation de leur groupe Juno, leur chemin a croisé celui du label communautaire […]
Il est loin le temps où Yann et Julien étudiaient le droit à la fac de Nanterre. Depuis une dizaine d’années, ces deux amis sont liés par leur amour pour la musique, notamment celle des années 80. Après de nombreuses aventures musicales, dont la formation de leur groupe Juno, leur chemin a croisé celui du label communautaire My Major Company qui est derrière les succès d’artistes comme Grégoire, Joyce Jonathan ou Irma. A quelques jours de la sortie de leur album Speed Racer, les deux musiciens nous ont reçues. Rigolade, amitié et passion étaient au rendez-vous.
TDN : Votre premier album Speed Racer produit par le label communautaire My Major Company est dans les bacs ( depuis le 15 octobre). Comment définiriez-vous votre musique ?
Julien : On est à la rencontre de la pop à la Keane, du rock à la Phoenix et de la folk à la Simon and Garfunkel. Au niveau de la guitare électrique, on a une influence French touch. Avec la guitare folk, c’est de la folk à la Neil Young ou des choses plus modernes comme le dernier album solo de Noel Gallagher que j’adore. Pour ce qui est des parties synthétiseur et des programmations de batterie, des basses, l’influence est beaucoup plus synthétique. Mais là je n’y connais rien, c’est Yannick le spécialiste. Il va dire des noms de groupes que je connais pas. (Rires)
Yann : On utilise le synthétique pour tout ce qui est clavier. Ce sont des claviers qui sont là depuis les années 70. Sinon, nous faisons surtout de la musique à base de mélodie. On essaie de donner une sonorité contemporaine à nos morceaux. On veut surtout pas refaire la musique des années 60 ou 70 qui a déjà été faite, ni celle des années 80 qui elle aussi a été faite.
Julien : Très bien faite !
Yann : On essaie justement de faire cette musique entre la pop, le rock, un peu teintée d’électro. La base mélodique est facilement accessible.
Cool leur pochette !
TDN : Pourquoi les années 80 vous ont marqués musicalement ?
Yann : D’abord, Julien et moi sommes nés au début des années 80. Au-delà de la musique conventionnelle qu’on trouve chez les disquaires, c’est surtout les musiques de séries et de films des années 80 qui nous ont influencés. Durant cette période, les mélodies se créaient à foison et étaient d’un niveau incroyable. La musique de la série Alf, par exemple, entre le jazz et le rock, était démentielle.
Julien: La meilleure définition de notre musique est une version moderne des BO de films et de séries des années 80. On est allés jusqu’à composer en regardant, sans mettre de son, les épisodes de Alf.
Yann : J’ai l’impression qu’on retrouve ça de plus en plus, par exemple chez Breakbot, Jamaica, ou le dernier Justice. Ces types ont eux aussi voulu recréer ce qu’ils ont pu connaître dans les séries des eighties. L’influence vient aussi d’artistes plus conventionnels comme Wham, le premier groupe de George Michael ou Michael Jackson.
Julien : Au-delà de Michael qui avait déjà un son de malade, il y en avait d’autres qui commençaient tout juste à maîtriser les sons de clavier, comme the Cure. Ces mecs-là ne savaient pas faire au niveau du son, ils étaient donc obligés d’avoir des mélodies qui tuaient. Moi c’est ce que j’aime, faire de la musique avec des sons pourris pour se forcer à avoir des mélodies qui tuent. Non pas que nos sons soient pourris. Les mecs avec qui on a travaillé savent quand même faire de bons sons. (Rires)
TDN : La musique est donc pour vous un éternel recommencement ?
Yann : Tout à fait. On n’invente rien. On recrée. On essaie de retrouver ce sentiment qu’on avait quand on était plus jeunes en écoutant de la musique…
Julien : …en y ajoutant ce qu’on a pu écouter depuis. On s’est dit que ça n’avait pas été fait de mélanger trois styles différents en remettant le tout au goût du jour avec notre personnalité. J’essaie de faire du Michael Jackson, mais je ne suis qu’un petit blanc. Je suis génétiquement et musicalement plus proche d’Oasis que de Michael Jackson.
TDN : Parlez-nous de votre première rencontre.
Yann : Notre première rencontre, c’était au début des années 2000. J’étais en fac de droit à Los Angeles. Nous sommes tous les deux des juristes à la base. Julien, lui, était en vacances. Néanmoins, la rentrée suivante, on s’est retrouvés à la fac de Nanterre. Notre rencontre était assez naturelle car on n’avait pas l’intention de faire de la musique ensemble. On était juste potes. Julien avait déjà un groupe de musique. J’aimais bien dessiner. J’ai d’ailleurs fait une pochette pour son groupe. Puis un jour, j’ai appris qu’il s’en était séparé. C’est après cet épisode qu’on a commencé à faire de la musique ensemble.
Julien : On est passé par une période de remise en question lorsqu’on était sur Paris. On était tous les deux un peu pommés. On a passé pratiquement deux ans, à marcher sept heures par nuit, avec la guitare et un clavier sur le dos et à s’arrêter à tous les coins de rue, tout en évitant les bastons… enfin en ce qui me concerne. (Rires)
Yann : c’était sans aucune prétention de signer quoique ce soit. On avait juste envie de faire de la musique.
Julien : Puis progressivement, on a voulu que les gens nous écoutent.
Yann : On nous disait que notre musique était bien, donc on y a cru. Lorsqu’on a la possibilité de vivre de sa passion, on essaie de le faire.
TDN : Concrètement, quand avez-vous décidé de former un groupe ?
Julien : Il y a eu un groupe avant. On était six à faire de la pop-rock beaucoup plus traditionnelle. On s’appelait Inside Jack. On a eu la chance de travailler avec des professionnels, très talentueux comme Pierrick Devin qui est le guitariste de Cassius et qui a fait des super remix pour Phoenix, et Stéphane Briat qui est le créateur du son de Air. On était signés. Puis on a eu un problème humain au sein du groupe. On a du tout laisser tomber alors que l’album était prêt. Il y a eu une sortie en numérique mais pas en physique. A ce moment là, on a reçu un mail sur MySpace, de Michael Goldman (ndlr: l’un des fondateurs de My Major Company et fils de Jean-Jacques Goldman) lui-même. A l’époque, My Major Company n’était pas aussi important qu’aujourd’hui. Michael nous a rencontré et nous a dit qu’il adorait notre musique. Ayant notre porte de sortie, on est partis avec Vlad, notre batteur.
TDN : Pourquoi avoir choisi le nom Juno ?
Julien : Deux choses justifient ce choix. On est passés d’abord par des noms plus prétentieux, du genre Atlas. Rires. En fait, on adorait le son du juno, qui est un clavier.
Yann : L’autre raison est qu’on est férus d’astronomie. Juno est une mission de la NASA, qui a été lancée en direction de Jupiter, pour étudier les pierres qui gravitent autour de la planète et qui permettra de mieux comprendre la création du système solaire. C’est un retour aux origines. Pour nous, la musique, c’est exactement ça, c’est-à-dire un retour à la mélodie. Juno est un parallèle. Puis ce nom est très simple.
Julien : J’ai beaucoup insisté pour que ce soit un nom en un mot et qui commence par une consonne. J’ai laissé carte blanche à Yannick qui est arrivé plus tard avec ce nom. J’avais remarqué que les Djs, n’arrivaient pas à dire Inside Jack de façon fluide. Si on avait été dans un pays anglo-saxon, ce serait passé dans problème.
Yann : C’est toujours très compliqué de trouver un nom.
Julien : Cela a été dur de le garder. On a été approchés par plusieurs marques qui trouvaient que notre nom était trop proche du leur. On a du les rassurer en leur répétant qu’on faisait juste de la musique et qu’il ne pouvait pas y avoir de confusion.
TDN : Avant d’être sollicités par Michael Goldman, connaissiez-vous My Major company ?
Yann : On ne connaissait que très peu le concept. On connaissait le succès de Grégoire mais on ne savait même pas que My Major Company était derrière son album. On était un peu sceptiques au départ parce que c’est toujours compliqué d’expliquer que votre label n’est pas conventionnel, comme peuvent l’être Warner ou Sony. Pour un artiste, le rêve est de signer chez une major. Puis on a compris que My Major Company en avait toutes les qualités.
Julien : Ce qui m’a convaincu, c’est le concept de pré-validation par le public. Il y a une rencontre immédiate. Il ne faut pas attendre la sortie de l’album pour savoir si on va dans la bonne direction artistique. Le public te dit que ce que tu fais, c’est ce qu’il veut entendre. On s’est dit, si au bout de six mois, on n’a pas les 100 000 euros, on lâche l’affaire parce qu’on n’y arrivera jamais. Ça n’a pas de sens de s’acharner pendant mille ans. On a eu beaucoup de chance d’avoir l’argent en trois mois et demi.
Yann : L’aspect financier n’est pas négligeable aujourd’hui. Très peu de labels sont à même d’apporter 100 000 euros pour la production et la promotion d’un album.
Julien : Avec des gens qui mettent de l’argent sur un projet indé en anglais, alors qu’on est en France, et que My Major Company vend extrêmement bien la variété, on peut vraiment parler d’un mécénat. On était très touchés.
TDN : Est-ce que cette pré-validation par le public vous rend plus confiants ?
Yann : Oui et non. Des gens ont misé de l’argent et on ne veut pas les décevoir. On a des comptes à rendre. Il s’agit de les remercier de cette confiance. C’est aussi leur album…
Julien : …même si on n’a pas pu les consulter pour toutes les décisions.
Yann : On est un peu angoissés malgré le soutien du public, comme tous les artistes.
Julien : Ce qui m’angoisse réellement, ce n’est pas la vente de l’album, même si c’est important, c’est que ça ne plaise pas. Au-delà des critiques de grands ou de petits journaux, ce qui m’intéresse, c’est le garçon ou la fille qui écoute l’album et qui le trouve intéressant. Je veux que les gens écoutent l’album entier. Qu’ils l’achètent ou qu’ils l’écoutent sur Deezer, ça m’est égal. Je ne veux pas qu’ils s’arrêtent au single qu’on leur a vendu. Dans la culture française, les gens écoutent les albums en entier, contrairement à ce que veulent nous faire croire les médias. Ils achètent l’album, tant pour le single qui les a fait chantonner, que pour son ensemble. Il fut un temps dans les années 90 où on avait un titre phare et douze titres pourris derrière. Le type qui était une star pouvait se le permettre. Il n’y avait pas de moyen de vérifier le reste de l’album sur Deezer ou YouTube. Aujourd’hui, les choses ont bien changé. Vous pouvez « tester » l’album avant de l’acheter.
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TDN : Qu’est-ce qui vous attend dans l’immédiat ?
Yann : On va retourner en répétition de manière intensive pour préparer le concert du Nouveau Casino dans lequel on chantera avec Hanna, qui est une artiste de My Major Company qu’on aime beaucoup. Ça va être une très belle scène. On a prévu d’autres scènes pour lesquelles on attend confirmation.
Julien : J’ai hâte de refaire du vrai live parce que pendant les vacances, on a eu des scènes acoustiques où on avait droit qu’à deux décibels et demi, c’est-à-dire seulement une guitare et une voix. Yannick a été privé de scène.
Yann : On est deux et je réussis quand même à être la cinquième roue du carrosse. (Rires)
Julien : J’ai très envie d’avoir mes potes avec moi.
TDN : Est-ce que chacun de vous à un titre fétiche ?
Yann : Mon titre préféré est What Do You See. C’est une valse électronique. Cette chanson sort du lot en termes de mélodie et de construction rythmique. Je me retrouve en train de la danser façon valse, chez moi. Il n’y a que des synthés dans ce morceau.
Julien : Il y a un mini-hommage à Pharell Williams dans le morceau.
Yann : Cette chanson m’évoque des sonorités de Flash dance. Le titre Maniac est pour moi extraordinaire. Il a eu le manque de bol de tomber à l’époque face à Beat it de Michael Jackson lors des Grammy awards.
Julien : Mon titre préféré est When you fall . La première raison est que ça ressemble aux albums de Blur. J’ai voulu rendre hommage à la Britpop des années 90, notamment dans le refrain, qui m’évoque le début de Morning glory d’Oasis. Puis pour des raisons sentimentales car je l’ai composé pour ma femme. C’est le seul texte que j’ai écrit.
TDN : Merci beaucoup.
Juno : Merci à Truc de nana.
L’album Speed Racer est disponible depuis le 15 octobre. Vous pourrez aussi retrouver Juno au Nouveau casino le 19 novembre.
Propos recueillis par Sabrina Cicchini.
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