Réunions de famille pour les fêtes, on aime ou on appréhende ?
Ecrit par Justine Andansonle 23 décembre 2019
Les réunions de famille sont très souvent l’occasion de réjouissances mais aussi de règlement de compte. On assiste alors parfois à des conflits ouverts, faisant jaillir les griefs d’antan et la rancœur accumulée depuis tant d’années. Mais la plupart du temps celle-ci s’exprimera par des petites attaques voilées, des piques plus ou moins drôles, des silences lourds de sous-entendus ou encore des regards aussi acérés qu’exaspérés.
Noël, qui est avant tout la fête du don, de la générosité et surtout des enfants, reste paradoxalement un moment où certaines familles et personnes éprouvent plus que jamais la solitude, la frustration, le sentiment d’obligation et des tensions. Bref, des moments pas toujours bien appréciés.
On a toutes en tête des phrases entendues, par ci par là
« De toute façon, il n’y a que moi qui fait tout »J’ai pas le choix, je suis bien obligée d’y aller, chez ses parents, sinon c’est la guerre ! Chez ta mère, je peux rien faire, je peux rien dire ! J’ai juste à attendre que ça passe ! »
Quel étrange sentiment de se sentir obligé de tout faire, alors que personne ne l’a demandé, et que l’on va reprocher à tout le monde de rien faire. Voici une belle illustration des paradoxes relationnels familiaux.
Toutes les familles connaissent des sujets glissants, sur lesquels il ne faut pas s’aventurer sans risquer de transformer le déjeuner festif en pugilat: L’éducation des enfants, les comparaisons entre eux, les préférences parentales réelles ou supposées, l’argent, la religion, la politique, le poids, la cigarette, le célibat…C’est pourquoi certains repas peuvent donner l’impression de ne pas se rencontrer. Certaines familles, pour éviter tout conflit, ont opté pour des échanges très factuels, un humour facile, de manière à ce que le discours soit peu chargé d’affect. On ménage tout sentiment d’hostilité au risque parfois de passer à côté de l’essentiel qui la rencontre, un bon moment en famille.
Les occasions d’envenimer l’ambiance sont tout aussi multiples. Chiche, on liste.
Les cadeaux :
Qui les as choisis ? A qui ils sont adressés ? Quel est l’engagement de la personne qui les a offerts ? Et surtout, il y a-t-il une égalité entre les enfants ?
Le parti pris? On tente d’en rire si vous recevez votre 5e écharpe. En plus, vous pourrez soit l’offrir (chouette un cadeau d’avance!) soit la vendre.
La cuisine :
Entre les vegan, les allergiques, les goûts, il est important de féliciter les cuisiniers et leurs efforts, et accepter qu’ils ont pu oublier en présentant un plat HS. Mais c’est sûr, si votre belle mère (toujours elle) fait « exprès » de vous cuisiner une bonne viande alors que vous avez dit haut et fort que vous êtes vegan et que surtout, elle vous pose la question : Tu n’aimes pas? Il est évident qu’il y a une source d’énervement. Car il est essentiel de cuisiner des plats et des aliments qui conviennent à tous dans la mesure du possible si les gouts sont clairement exprimés.
Le parti pris: Je vais me rattraper sur le dessert et tant mieux si je mange moins, à moi la robe super moulante du 31 décembre.
Le comportement de chacun
Et là il y a des dossiers:) Comment chacun se comporte-t-il au sein d’un groupe, de la famille? Comment fait-on vivre sa problématique personnelle au sein du groupe ? Et notamment le fameux complexe d’Œdipe, qui exacerbe la plupart des relations entre les couples et les beaux-parents.
Le parti pris: On ne change pas les personnes. Mettez-vous en spectateur, écoutez mais ne vous mouillez pas. A quoi cela sert?Il y aura toujours la tante relou, le gamin capricieux, la star….
Les horaires
Oui, certaines personnes arrivent systématiquement en retard. C’est connu et acquis.
Le parti pris: Si c’est vous qui recevez, trichez sur l’heure du dej ou dîner. Si vous êtes une convive, plaignez intérieurement la maitresse de maison et ne prenez pas part à la sempiternelle discussion.
Les jeux
Alors là, grand moment. On est partis pour jouer, donc s’amuser et cela peut virer très vite. A vous de gérer et d’assumer le mauvais joueur, le jeu débile, les règles revisitées…et surtout évitez les jeux d’argent.
Le parti pris: Surtout ne jouez pas au JEU, un jeu proposé dans le film du même nom car vous prenez beaucoup de risque. Pour ceux qui n’ont pas vu le film, dommage.
Les fêtes peuvent aussi être agréables et sereines. En général cela se produit quand chacun est à l’aise avec son ambivalence.
Elevons un peu le débat et donnons la parole à une psy qui va expliquer:
Qu’entend-on par ambivalence?
L’ambivalence, c’est le fait d’avoir des sentiments d’amour et d’hostilité pour la même personne. Comme l’ambivalence est l’inverse de l’idéal, que celui-ci soit négatif ou positif, cela signifie que l’on accepte d’aimer l’autre avec ses défauts, et également que l’on reconnaît des qualités chez une personne que l’on affectionne peu ou pas. Par extension, cela signifie que l’on comprend que l’on reste digne d’amour même si on fait des erreurs ou que l’on ne corresponds pas totalement au désir de l’autre.
Ainsi on n’aura pas peur de perdre l’amour de la personne si on a pas choisi le cadeau escompté, si la bûche est mauvaise… Être à l’aise avec son ambivalence, c’est aussi laisser la place aux autres en tant que sujet, en tant que personne distincte de soi et avec des désirs, des pensées estimables et avec une autonomie propre. Les fêtes de familles qui se passent bien, sont celles où chacun peut s’exprimer librement et dont les silences seront également respectés, celles où les invités ne sont pas mis en position d’objets ou de public alimentant la mise en scène des conflits inconscients de chacun.
Les Noëls qui se passent le mieux sont ceux où tout le monde comprend le but de la fête, l’intérêt qui nous transcende et qui nous dépasse tous, le partage, la transmission et les enfants.
Bonnes fêtes à toutes avec ces précieux conseils.
Zoé Piveteau (et Marie TERRY)
Psychologue Clinicienne
Plutôt original ces idées de couleurs