SA VIENé à Kyôto en 1949 et élevé à Kobe, Haruki Murakami a étudié le théâtre et le cinéma à l’université Waseda, puis dirigé un club de jazz à Tôkyô pendant huit ans : le Peter Cat. Murakami reste un passionné des chats, ses seuls véritables amis pendant une enfance solitaire ; c’est cette amitié […]
SA VIE
Né à Kyôto en 1949 et élevé à Kobe, Haruki Murakami a étudié le théâtre et le cinéma à l’université Waseda, puis dirigé un club de jazz à Tôkyô pendant huit ans : le Peter Cat. Murakami reste un passionné des chats, ses seuls véritables amis pendant une enfance solitaire ; c’est cette amitié qui explique la présence invariable de cet animal dans sa littérature. Une fois sa renommée établie après plusieurs romans à succès (il remporte le prix Gunzo, équivalent du Goncourt au Japon, pour son premier livre « Ecoute le chant du vent » en 1979), il part vivre à l’étranger : tout d’abord au sud de l’Europe (Italie et Grèce) puis aux États-Unis où il enseigne la littérature japonaise dans diverses universités comme la très réputée Princeton. En 1995, suite au tremblement de terre de Kobe, il décide de rentrer au Japon où il continue à écrire et à traduire plusieurs écrivains anglo-saxons tels que Scott Fitzgerald et John Irving. Aujourd’hui, il est très certainement l’auteur japonais le plus connu et le plus vendu dans le monde (il est traduit dans 30 pays), il a même été pressenti plusieurs fois pour le prix Nobel de littérature !
SON UNIVERS
Presque tous ses livres partent d’une situation anodine, voire banale puis basculent tout doucement dans le fantastique et l’imaginaire. Et c’est bien là l’intérêt et le génie de Murakami : il nous emmène dans sa folie douce et onirique avec des effets de surprise toujours maîtrisés sans que l’on ne se pose de questions. On part du postulat que « c’est comme ça » et on suit avec passion l’évolution des personnages et des relations qui les unissent. Quand on ouvre un de ses bouquins, on ne sait jamais vraiment où l’on va car tout peut basculer d’un moment à un autre. Chez cet auteur, il faut s’attendre à tout, surtout au plus étrange !
Les protagonistes favoris de Murakami sont des trentenaires de classe moyenne un peu blasés ou mélancoliques et généralement célibataires (il y a d’ailleurs peu de personnages dans ses romans). La symbolique et la mystique japonaises sont omniprésentes mais restent parfaitement abordables pour un lecteur occidental. Il est lui-même féru de littérature et de musique occidentale (il voue un véritable culte au jazz) auxquelles il fait référence en permanence. En outre, la bière et la cuisine japonaise sont très présentes dans ses récits, de quoi donner envie de manger et de boire toutes les cinq pages…
Il aborde des thématiques de vie contemporaines plus ou moins graves : la solitude, le suicide, l’adolescence, le divorce, le tourment, la mélancolie… Bref, on plonge en plein existentialisme mais sans complaisance gratuite. Ces évènements sont donc tout d’abord noyés dans le quotidien d’une vie citadine moderne puis débute une quête initiatique qui va emprunter souvent des voies inattendues vers, si ce n’est une « rédemption », une évolution des personnages. Ces derniers pourront trouver alors les clefs pour grandir, franchir le pas d’une difficulté et finalement trouver un mieux-être. Dans ce cheminement, il prend également un malin plaisir à jouer avec le lecteur, à brouiller les pistes tout en ponctuant ses descriptions d’un humour décalé et d’une vision du monde à la fois désabusée et cocasse. Par ailleurs, ses romans sont ponctués de personnages étranges et loufoques comme « l’homme-mouton », des chats qui parlent, des adolescentes dignes de Nabokov, des politiciens étranges… En outre, le sexe et un certain fétichisme érotique prennent une dimension importante dans ses œuvres, et ce, d’une manière parfois très crue.
Mais attention, l’auteur prend son temps pour planter son décor (les romans frôlent souvent les 600 pages), on le suit comme dans une procession lente et mesurée (rassurez-vous, il a heureusement le chic de n’être jamais ennuyeux !). La manière dont il décrit une atmosphère générale est époustouflante : tantôt on ressent l’extrême chaleur d’une plage d’Hawaï ou de Grèce, tantôt le froid et l’humidité de l’Okaïdo, tantôt le tumulte et l’anonymat d’une grande mégapole.
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Alors, pourquoi lire Haruki Murakami ? Déjà parce que la plupart des sentiments abordés dans ces écrits (l’amour, la mort, la peur, la tristesse…), nous les avons toutes et tous connus un jour ou l’autre et c’est avec beaucoup de subtilité et de tact (son style d’écriture est ma foi simple et limpide), qu’il les dépeint. Ensuite parce que chaque roman se présente un peu comme la catharsis du héro, sa (re-)découverte intérieure en allant toujours au plus profond des choses. Et c’est aussi un peu la notre… Enfin, parce que son univers est unique et attachant : quand on se plonge dans un de ses romans, c’est au risque de se laisser entraîner dans une histoire captivante et fascinante tant et si bien qu’on a parfois bien du mal à en ressortir…
SON ŒUVRE
Je vous conseille de commencer par, à mon avis, son meilleur ouvrage : « La course au mouton sauvage » (2002, Seuil) : ce roman profondément métaphysique tourne autour de la quête d’une race de mouton qui n’a jamais existé au Japon pour nous emmener dans un pays empreint à la fois de modernité et de traditionalisme ancestral, aux frontières de la réalité et de l’au-delà. Pour continuer à découvrir son univers, je vous invite à lire le génial « La fin des temps » (2001, Seuil) : un informaticien solitaire travaillant pour un vieux savant étrange, va être entraîné dans une aventure terrifiante qui se déroule tantôt dans une ville onirique peuplée de licornes (où il est retenu prisonnier), tantôt dans des sous-sols infestés de monstres terrifiants qu’on ne voit jamais, tantôt dans un environnement high-tech et anonyme. Et puis, pourquoi pas le très romantique « Au sud de la frontière, à l’ouest du soleil » (2003, 10/18) (à la recherche d’un amour de jeunesse perdu) ? Par la suite, vous n’aurez que l’embarras du choix parmi une quinzaine de titres : « Les amants du Spoutnik » (2004, 10/18), « Après le tremblement de terre » (2002, 10/18), « Chroniques de l’oiseau à ressort » (2004, Seuil)… ou encore ses petits derniers « Kafka sur le rivage » (2007, 10/18) et « L’éléphant s’évapore » (2008, Belfond).
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Alors si vous êtes attiré par les romans qui vous emmènent loin, très loin dans les mystères de notre monde moderne et qui contribuent à nous faire découvrir nos ténèbres intérieures (souvent dignes des meilleurs auteurs romantiques) tout en ajoutant des touches d’humour bien dosées et une sensualité troublante, vous allez adorer Haruki Murakami et son imaginaire délicieusement drôle et onirique et… dévorer ses publications ! Des auteurs de ce calibre sont malheureusement trop rares…
Visuels : Haruki Murakami Official Website et Amazon.fr.
Par Ariane-Isabeau Noël
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