suicide

Le suicide chez les ados

Ecrit par Justine Andanson
le 1 janvier 2009

La puberté est un moment clef dans la vie de l’individu, il s’agit d’un parcours qui est semé d’embuches sur les plans sociaux, affectifs et corporels : on est en pleine quête identitaire, à la recherche d’un soi à la fois désiré et craint ; on comprend donc mieux comment ces enjeux peuvent engendrer des […]

La puberté est un moment clef dans la vie de l’individu, il s’agit d’un parcours qui est semé d’embuches sur les plans sociaux, affectifs et corporels : on est en pleine quête identitaire, à la recherche d’un soi à la fois désiré et craint ; on comprend donc mieux comment ces enjeux peuvent engendrer des doutes et des angoisses auprès des jeunes et pourquoi cette période déjà fragilisée peut être propice au passage à l’acte suicidaire. Avec environ 1000 décès par an, le suicide se présente comme la deuxième cause de mortalité en France chez les 13/24 ans, et ce, après les accidents de la route. Le suicide est déjà un sujet difficile lorsqu’il concerne un adulte, alors que penser quand ce geste fatal concerne un adolescent ? Quels mécanismes, quelles angoisses et appréhensions face à la vie peuvent pousser un jeune à passer à l’acte ?
L’incidence des suicides est identique dans tous les pays occidentaux (le taux le plus bas est en Angleterre) et ils sont heureusement très rares chez le jeune enfant. On relève une augmentation franche depuis les années 60 et même s’il ne concerne approximativement que 7% des enfants scolarisés, il semble que 25% ont des idées suicidaires durant leur adolescence. On considère un sex-ratio de trois filles pour un garçon mais la mortalité est deux fois plus importante pour ces derniers: les filles sont donc plus en risque de passer à l’acte que les hommes mais ils sont plus en risque de décès. Si les médicaments sont utilisés dans la plupart des cas (il faut donc se méfier des prescriptions de psychotropes chez les ados), les jeunes peuvent également faire usage de moyens très violents pour mettre fin à leurs jours comme la phlébotomie (se couper les veines) ou la défenestration pour les filles et les armes à feu ou la pendaison pour les garçons. En outre, les tentatives de suicide sont 30 fois plus fréquentes que les suicides réussis à l’adolescence.
Les idées suicidaires, dont la gravité dépend autant de la chronicité que de l’intentionnalité (désir de mort, préparation de l’acte, achat de toxiques…), ont été moins souvent étudiées. Autrefois jugées « banales » à l’adolescence, on s’accorde actuellement à les considérer comme un motif suffisant d’intervention et de prévention. On relève certains facteurs à risque que l’on retrouve plus fréquemment chez les jeunes ayant fait une tentative de suicide (attention, pris individuellement, ils ne sont pas nécessairement associés à une tentative de suicide). Le jeune suicidaire se perçoit souvent comme mauvais, passif, coupable et a une faible estime de soi. Il se sent indésiré et n’a généralement pas de but dans la vie, ne voit se voit pas d’avenir et à l’impression de ne jamais être à sa place. Il peut aussi avoir des difficultés quant à son identification sexuelle, mal vivre son homosexualité.
En termes de facteurs comportementaux on va relever une consommation plus importante de drogues, d’alcool et de tabac, un parcours scolaire en dents de scie (retards fréquents, absentéisme, redoublements…), des fugues, des actes de délinquance ou des violences subies (viols…). Le climat familial de ces ados est toujours perturbé soit à cause de la séparation des parents, du décès de l’un d’eux ou d’un ami proche (il peut s’identifier à lui et le voir un modèle) ou parce qu’il est touché par une pathologie de l’un des parents : alcool, dépression, suicide qui désinhiberait l’acte… Des problèmes de communication interfamiliaux sont aussi des facteurs comme l’incompréhension, le manque de maturité des parents, le manque de soutien, la dégradation verbale ou le rabaissement du jeune, l’absence d’implication affective ou encore le placement à répétition dans des familles d’accueil. A l’inverse, des parents trop présents, qui exercent un contrôle excessif ou qui sont trop intrusifs peuvent perturber également l’adolescent qui va se sentir dominé et en souffrir.
Sur le plan somatique, le jeune peut ressentir une fatigue intense et inexpliquée, des problèmes pathologiques divers et persistants comme des maux de tête, des douleurs au ventre et encore des troubles du sommeil. Sur le plan psychique, on relève dans 30% des cas la présence d’un état dépressif, des troubles anxieux et des personnalités antisociales (délinquance par exemple). Enfin, sur le plan biologique, certaines thèses avancent qu’une surproduction globules bancs (qui vont éliminer les rouges), peut entraîner une légère baisse de l’oxygénation ce qui impacterait sur le psychisme d’où des états de déprime et une facilitation au suicide.
Quels sont le signes ? Bien que ces signes ne soient pas spécifiques d’une volonté de se suicider, ils notent toutefois une rupture vis-à-vis d’un comportement antérieur et peuvent éveiller la vigilance des familles. Corrélativement, on a retrouvé dans 70% des cas : des soucis scolaires, une rupture sentimentale (les jeunes suicidaires sont généralement plus engagés dans leurs histoires d’amour et vivent donc très mal les séparations) et des problèmes familiaux. Certains adolescents suicidaires sont seuls et ils ont l’impression d’être rejetés par leurs pairs. Cependant, tous les adolescents suicidaires ne sont pas nécessairement isolés socialement (ils peuvent posséder un réseau d’amis). L’adolescent suicidaire vit donc un isolement qui est davantage affectif que physique.
Le processus suicidaire est la période qui sépare le moment où la crise survient et le passage à l’acte. Il commence par la recherche de solutions pour résoudre le problème qui occupe l’esprit de la personne. A ce stade, l’idée du suicide n’a pas été encore envisagée ou alors très peu. Puis, apparait l’idéation suicidaire où l’image soudaine et brève de la mort se présente comme une solution au problème. On commence à élaborer des scénarii pour déboucher sur la phase de rumination : l’inconfort devient de plus en plus difficile à supporter et le désir d’y échapper s’intensifie, l’idée du suicide devient récurrente et angoissante car elle apporte beaucoup de souffrance. Enfin, on assiste au stade de la cristallisation. La personne est en effet submergée par le désespoir et elle élabore généralement un plan précis pour mettre fin à ses jours (mode, lieu, date). Durant cette période, la personne peut paraître plus calme, comme soulagée puisqu’elle tient le moyen de se sortir de ses problèmes (elle peut se couper émotionnellement des autres). Parvenu à l’étape de la cristallisation le passage à l’acte devient imminent et ce que l’on qualifie d’élément déclencheur (un événement précipitant l’acte comme un problème qui s’ajoute : une mauvaise note, une dispute) pourra le précipiter. Notons qu’à l’adolescence, ce processus peut être très court, soit quelques heures à peine. On parle alors plutôt d’une tentative de suicide impulsive car elle est non mentalisée et non préparée. Le désir de mort peut être paradoxalement absent mais plutôt le souhait de vivre autrement.
A nouveau, le facteur déclenchant est un évènement récent qui fragilise l’adolescent, le rend incapable d’accepter un échec, de trouver une réponse à sa souffrance mais attention à ne pas le confondre avec la cause réelle surtout s’il semble anodin. On ne doit pas forcément interpréter une tentative de suicide comme un renoncement mais plutôt comme une revendication à laquelle il faudra prêter l’attention la plus grande. Il ne faut jamais prendre à la légère une tentative de suicide. L’évolution d’un suicide « manqué » se regarde sur deux plans : à court terme avec une fréquence des récidives qui peut être proche de 30% à 40% surtout dans l’année qui suit le premier geste ; à long terme avec une instabilité scolaire, la persistance de difficultés psychosociales, affectives, relationnelles. Par ailleurs, on relève une mortalité accrue par suicide ou mort violente dans la décennie qui suit (6%). Ensuite, il faudra parler, établir un climat de confiance et ne pas hésiter à poser des questions directes pour comprendre l’origine (cela ne doit surtout pas devenir un sujet tabou) et faire comprendre l’angoisse et la tristesse ressenties par les proches. Bien sûr, une prise en charge avec un psychologue (élément extérieur et professionnel médical) est indispensable.
Le suicide est donc très souvent la conséquence funeste d’un problème existentiel, d’une personne en profonde souffrance. Et si on parle communément « de mettre fin à ses jours », il faut savoir que le suicide peut aussi être un moyen de mettre fin à une situation familiale, scolaire, psychosociale ou affective qui est devenue insoutenable. Il est donc crucial d’être à l’écoute pour comprendre les motifs qui peuvent pousser à s’ôter la vie pour ne pas s’en priver, elle est déjà tellement courte… Il est également important de savoir qu’il n’est jamais trop tard pour intervenir car la personne reste hésitante et à peur jusqu’au dernier moment, ce qui peut permettre d’interrompre le processus à tout instant.

Quelques livres pour en savoir + : « 100 réponses sur : Le suicide des adolescents » par Valérie Samouel et Pierre Satet (éditions Tourrnon) ; « Le suicide des jeunes : Comprendre, accompagner, prévenir » de Maja Perret-Catipovic et Michel Bavarel (éditions Saint-Augustin) ; « La tentation du suicide chez l’adolescent » par Alain Meunier et Gérard Tixier (chez Payot).

Sources : INSERM, Institut Mère-Enfant de Rennes, [url=http://www.psychomedia.qc.ca]Psychomedia[/url]

Par Ariane-Isabeau Noël

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