Il y a longtemps …

« Il y a longtemps » est un titre qui accroche immédiatement par son caractère nostalgique et donne envie d’ouvrir la première page de ce roman tout de noir vêtu où son auteur, Pascal Marmet, va nous conter l’histoire d’une rencontre improbable et de la relation qui s’ensuivit amoureuse, tumultueuse et passionnée. Voici donc le dernier né de Pascal Marmet au parcours plutôt atypique : issu d’une famille bourgeoise, il a choisi (naturellement) la voie des affaires après ses études pour se retrouver aujourd’hui à la direction d’hôtels entre Paris et Nice. Certes, et l’écriture là-dedans ? Et bien, il se trouve qu’il a toujours eu le besoin (et la passion) de l’écriture dès le plus jeune âge et a déjà publié trois romans dont « Ludmilla » et « Le prince de Paris ».
Il s’agit d’une histoire d’amour avec une dualité d’écriture inédite car l’auteur décrit les mêmes évènements selon le point de vue des deux protagonistes : d’abord Pascal, puis Ludmilla. Les discours sont forcément différents, l’un impulsif voire paranoïaque, l’autre romantique, interrogatif, apeuré. Un homme, une femme. Une histoire d’amour bouleversante où, pardonnez-moi, l’on s’en prendrait presque à l’auteur de conclure sur un dénouement pareil.
La rencontre entre les deux personnages est assez improbable : un expert d’assurance quelque peu désabusé travaillant pour un boss peu scrupuleux, une belle jeune femme, bourgeoise, d’origine russe et surtout murée par un lourd secret ; tout comme la folle passion (destructrice) qui s’ensuit et pourtant, le livre est passionnant et… réaliste. Au-delà des nombreuses différences qui les divisent et les rapprochent en même temps, ils vont apprendre à se découvrir entre malentendus et conflits issus d’un profond mal-être commun. Quand bien des années plus tard la jeune fille révèlera sa vérité profonde et ses sentiments, il sera trop tard mais il restera alors le devoir de mémoire et les souvenirs de réalités ignorées et toujours vivantes. Comme quoi une rencontre peut bouleverser une vie et ne jamais s’oublier.
La description des sentiments allant de l’amour-adoration, à la suspicion en passant par la jalousie et la méchanceté gratuite, nous emporte dans un grand tourbillon et on aime ça car cette description est juste : on plonge alternativement dans le subconscient des personnages et dans la perception que chacun à de l’autre, comment chacun ressent cette relation si difficile à se construire où Pascal comme Ludmilla cherche à se trouver à travers le regard de l’autre. Le livre se lit très bien et l’écriture est de qualité avec un je-ne-sais quoi d’assez particulier et inédit dans son style.
Le seul reproche que je me permettrais, c’est que le livre est tout simplement bien triste (tout en étant très beau). Etait-il nécessaire de le conclure ainsi ? Certainement, pour donner de la profondeur et permettre une prise de recul face aux évènements. Mais attention, il ne fait pas non plus dans la « guimauve » comme dans Love Story (film que j’ai adoré aussi mais qui est, soyons honnêtes, un vrai tire larmes), il est juste très réaliste dans la construction du couple avec une issue dramatique en plus. Il montre que l’on peut se reconstruire et continuer à vivre après la perte d’un être cher mais que l’on ne pourra jamais l’oublier totalement.