Comment surmonter des crises de boulimie?
jeunefille, 24 ans
Bonjour !
Ça y est c'est les vacances et la même peur revient, enfin pas vraiment une peur mais ce que je redoute, vais-je réussir à m'alimenter correctement ? Une chose est sûre, je ne tomberai pas dans l'extrême inverse, donc dans la privation, la sous alimentation, voir l'anorexie. J'ai passé tellement de temps à me poser ces questions : l'anorexie serait-elle une solution ? Pourquoi ne commencerais-je pas et ensuite je m'arrêterais au bon moment pour manger de nouveau normalement, gérer une chose vraiment difficile, mais je ne veux pas tomber dans cette naïveté là. On pense contrôler, que l'on saura s'arrêter, puis un jour on se rend compte que l'on est sous l'emprise de tous cela : le poids, le moindre gramme de graisse. Alors non, je ne risque pas, du moins pas pour l'instant, mais c'est dur… Ça a commencé déjà rien que ce matin… Je suis motivée pour aller courir tous les matins, et cesser ces envies compulsives de manger tout ce qui se présente, mais je me laisse par moments me décourager parce que depuis le début de cette année (janvier), peu après mon entrée en troisième en internat et donc suite aux années précédentes et l'année dernière qui aurait été la dernière si je n'avais pas été en internat, j'ai cette peur qui grandit en parallèle avec ma reconstruction : ne pas être à la hauteur, ne pas être assez forte pour réussir, guérir et aller de l'avant. Alors que pourtant je revis, je suis avec mes amis (même s'il y a eu quelques petites histoires pas très graves), j'arrive à profiter à fond, je prends petit à petit confiance en moi, je n'ai plus cette mentalité de l'an passé où je m'apitoyais sur mon sort seule et me laissais tomber sans même me donner la peine d’essayer. Non, j'ai une nouvelle façon de voir les choses ou disons plutôt que je les vois enfin telles qu'elles sont. Je ne pars pas battue d'avance, non je donne tous ce que j'ai pour parvenir à ce que je souhaite obtenir et j'y parviens souvent. J'ai, en partie, ouvert les yeux grâce à un très bon ami qui ne pouvait plus supporter de me voir si triste de vivre, lui qui est un amoureux de la joie de vivre. Parler avec lui me donnait souvent l'envie de me battre mais souvent je perdais toute force, une motivation. Ce qui m'énerve également est le fait que, par moment, j'ai cet état d'esprit qui revient, et ça je le supporte pas. Je sais combien c'est énorme le chemin que j'ai parcouru, si le scanner d'esprit existait, en comparant celui d'il y a 12 mois et celui d'aujourd'hui, personne ne pourrait savoir, ni même se douter qu'il s'agit d'une même personne ! Qui sait ? Peut-être qu'avoir toujours dû tout surmonter seule dans le silence m'a donné plus de force que jamais. Je pensais en avoir la capacité d'avoir ? Mais voila, j'ai beau avoir pris confiance, m'être reconstruit, par moment tout s’effondre et je m'en veux mais pourtant, je peux rien y faire. Souvent je me retrouve seule et je le fais volontairement parce que je ne veux pas que mes amis s'inquiètent et je repars sur mes idées : « si je n'avais jamais existé, on n'en serait pas là, ma famille serait heureuse et sans problèmes, mes amis ne seraient pas blessés de me voir si mal ». J'ai souvent le regret de les connaître, de m'être ouverte à eux car je me dis que si je ne l'avais pas fait, ils n'auraient simplement pas à supporter le mal que je peux leur faire. Je sais qu'une telle histoire ne s'arrange pas en un claquement de doigts. Il m'aura fallu 10 ans pour comprendre et me convaincre au plus profond de moi que personne ne doit contrôler ma vie, mes envies,mes émotions, que le bonheur et la joie ne dépendent que de moi et que les mots ne sont que des sons prononcés par des imbéciles pour une grande majorité. Et pourtant toujours ces petites rechutes, alors je fais tout pour continuer et pour que les cordes se fassent plus solides et riches de sureté et de maturité, mais si vous aviez des petits conseils, ça ne serait pas de refus.
Encore merci pour votre temps temps précieux que vous m'accordez, et vos conseils d'une aide dont je connais la valeur. Merci encore !
Zoé Piveteau
Psychologue Clinicienne
Chère Jeune fille,
Comme tu l'écris si bien, la reconstruction est un long parcours. Il ne s'agit pas d'une autoroute expresse, lisse et en descente. Il y a aussi des étapes, des reliefs, des ornières et des côtes et donc des émotions qui y sont associées. De la même manière on peut avoir l'impression de reculer parce que l'on est confronté aux mêmes difficultés alors que l'on avait l'impression d'aller mieux. Mais, il n'en est rien. Même si on est confronté à des émotions ou des évènements similaires, à partir du moment, où l'on a une démarche de réflexion ( comme tu l'as ), on est enrichi des expériences passées et donc on ne vit pas la même chose.
Ce qui pourrait t'aider donc, c'est d'apprendre à t'offrir la tolérance que tu as pour les autres. Apprendre et continuer à être douce avec toi-même. C'est-à-dire, ne pas te blâmer quand tu ne te sens pas au mieux de toi-même et t'encourager quand tu te sens fragile. Et tu peux te féliciter du parcours que tu accomplis, faire le point comme tu le fais, en utilisant l'image du scanner est très parlante.
D'autre part, si tes amis sont bienveillants à ton égard, c'est que cela leur fai du bien aussi, tu n'es pas responsable de la manière dont il s'investissent auprès de toi, c'est qu'ils y trouvent aussi leur compte. Néanmoins, vous pouvez vivre d'autres moments que des relations de secours et d'aide. Continue d'apprécier ta vie comme tu le décris dans ce message.
Bien à toi.
Zoé Piveteau